ENFANTER LE LIEN - MERE - ENFANT - PERE- jeannette Bessonart

ENFANTER LE LIEN - MERE - ENFANT - PERE- jeannette Bessonart

page237 - à Ouargla en Algérie

Le lien mère/enfant/père dans la naissance  à Ouargla (Algérie) 
entre la tradition familiale et religieuse et le développement social 
Oumelkeir Kadi, sage-femme 


Tradition familiale: les dictons 

• « La femme fertile est épanouie », fière, surtout si elle a enfanté beaucoup de garçons. 

• « La femme doit souffrir pour enfanter », se dit encore, mais toute une technique psychologique est mise en route pour atténuer cette douleur. 50 % des femmes sont perdues entre la tendance moderne et traditionnelle. 

• « La femme est faite pour enfanter ». Mais le pourcentage des femmes qui allaitent au sein a bien baissé. Il reste encore 40 % des femmes qui allaitent au moins deux ans; un peu plus dans les régions retirées du pays Sud et des Hauts-Plateaux. 

• « La femme ne doit sortir que pour des raisons valables ». Venir en consultation de prévention maternelle est une bonne raison; c'est une victoire, bien que le mari puisse refuser cette prévention. Il est exceptionnel de voir le mari assister à une consultation, encore plus à un accouchement. Mais il peut accompagner sa femme et s'inquiéter de son état. 

• « La femme peut être répudiée pour des raisons de stérilité» (ou si elle n'enfante que des filles).Pourtant ces dernières années, les spermogrammes sont bien acceptés; les femmes commencent à être conscientes, demandent un dépistage pour leur mari et même un divorce si nécessaire. 

• « La virginité », une des conditions du mariage. Gare aux "écervelées». Le rôle de la sage-femme est complexe, surtout si l'hymen n'est pas présent. 

Ma place de sage-femme 

    Dans une région où l'imprégnation musulmane est forte, ou les habitudes, l'honneur masculin et la pudeur féminine existent encore, on compte plus de 50 % des accouchements à domicile. Une des raisons est que les conditions hospitalières sont inhumaines à cause du trop grand nombre d'accouchements par rapport au nombre de lits. 

     Pour respecter nos coutumes, j'appelle les mères par leur prénom. 

     Une bonne partie d'entre elles lie avec moi des liens d'amitié et de reconnaissance; «chez nous, les maîtres d'école et les sages-femmes sont honorés ». Le dialogue se fait en trois langues: l'arabe, le français et le berbère, qui est la langue maternelle. 

     La pratique traditionnelle de l'accouchement à domicile s'effectue souvent avec les accoucheuses traditionnelles. Par expérience, je pense qu'il n'y a pas mieux qu'accoucher à domicile, mais il faut être assistée en temps voulu et par une personne compétente. 

     La pratique traditionnelle joue sur la patience et la psychologie: - paroles et phrases très sages et relaxantes, apaisantes; 
- massage du corps, surtout le périnée, à l'huile d'olive; 
- boisson chaude de tisane de «romarin» durant le travail de l'accouchement ; 
- douches tièdes; 
- beaucoup de marche; 
- la sortie de l'enfant se fait assise, soutenue par une aide « proche» ou en s'accrochant à une corde, d'où l'expression« femme accrochée à la corde - femme en travail ». Depuis peu, on trouve un peu plus l'habitude de la position couchée; 
-la plupart des femmes ne crient pas, lancent des louanges, souhaitent que les contractions ne s'arrêtent pas jusqu'à la sortie de l'enfant; elles se dégagent de toute tension en demandant ce qu'elles désirent, ce qu'elles n'ont pu obtenir pendant la grossesse; 
- si le travail est lent, le mari participe à distance en lui envoyant une eau à boire, lui fait des prières. Il est dit « qu'un mari méchant ne facilite pas l'accouchement de sa femme ». 

     Depuis trois ans, j'accouche les filles et les femmes des garçons que j'ai aidées à naître. Beaucoup de ces enfants viennent me voir pour me connaître ou se faire connaître. Quelques-unes sont prénommées comme moi par reconnaissance. C'est très affectueux. 

Le Coran et le lien mère/enfant/père, le lien familial 

     Le lien mère/enfant/père, c'est la raison biologique de procréation qui fait que la naissance d'un enfant est le produit d'une sexualité conçue dans ses dimensions affectives et charnelles. 

     C'est aussi: 
-le droit des enfants à la vie et à l'amour de leurs parents; 
- les relations d'un enfant avec ses parents se situent dans les liens du sang, de l'amour, et se concrétisent dans l'assistance et la solidarité. 

     Ce qui empêche la création et le renouvellement de ce lien, c'est: 
-l'absence d'amour, 
-l'égoïsme, 
-le matérialisme, 
- l'ignorance. 

     Et pour faciliter le lien mère/enfant/père dans la naissance, il faut: . 
-l'amour réciproque des parents, 
- le choix de la procréation, 
- un climat équilibré pendant la grossesse et l'accouchement. 

Le développement social 

    Le développement social dans la naissance comporte un projet ambitieux: faire baisser la mortalité infantile. 

     Entre 1960 et 1984, le taux de mortalité infantile est passé de 170 % à 82 %. C'est encore très élevé. Un programme est mis en route pour réduire encore ce chiffre et arriver à 50 % en 1990. Les points forts de ce programme sont: 
-les vaccinations; 
-l'équilibre de la nutrition; 
-la lutte contre les diarrhées (30 000 enfants par an meurent de diarrhées) ; 
-l'espacement des naissances; 
-le suivi des grossesses; 
-les soins néonatals; 
-la lutte contre les affections respiratoires et infectieuses; 
- l'hygiène du milieu de vie. 

     A mon avis, le lien mère/enfant/père est bien sûr vécu en famille, mais il est tributaire aussi de la religion et du développement d'un pays et des efforts que fait celui-ci pour le bien-être des citoyens. 





07/02/2013
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