ENFANTER LE LIEN - MERE - ENFANT - PERE- jeannette Bessonart

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227 - les mères et les enfants d'abord


page227 - les mères et les enfants d'abord

Les femmes et les enfants d'abord 

Dr RÉMY  président de l'UNICEF 

     L'une des actions de l'UNICEF (et non pas la seule), c'est d'informer le monde de ce qui se passe ailleurs, sous toutes les latitudes et dans tous les pays. 

     L'optimisme « béat» que nous avions après la guerre, en 1945 (tout allait s'arranger, les guerres étaient finies ... ), était sûrement basé sur la méconnaissance de ce qu'étaient les situations réelles sur le terrain et que nous regardions souvent sous la« casquette» coloniale, militaire ou religieuse (les bons pères, les missionnaires) ... 

     Sauf situations très exceptionnelles, on ne se demandait pas: « Est-ce que les enfants vivent bien? Est-ce que les femmes accouchent bien? » Non, on voyait cela sous l'angle romanesque et exotique. 

     La différence qui existe entre cette époque et 1988, c'est qu'on a aujourd'hui une meilleure connaissance des problèmes qui sont posés et de la manière dont les gens vivent, «en situation », bien que nous ayons tendance à croire que tout se passe comme nous le savons et comme nous le pensons! 

     Nous pensions naïvement que nous allions offrir ce qu'il y a de meilleur, «la modernité », la technologie, qui permettraient d'améliorer la qualité de la vie, la longévité, la diminution des souffrances et des charges. On pensait même que cela allait se faire tout seul. 

     Et on s'aperçoit que cela est plus complexe! 

     Entre ce qui se passe dans une institution normale, en situation de développement - par exemple, dans un accouchement à domicile en France où il y a de quoi écouter les bruits du cœur fœtal, un téléphone et une voiture en cas de problème -, et la situation de l'accouchement en Nouvelle-Guinée, dans la forêt, il y a un espace considérable ... où 350 enfants sur 1000 n'atteignent pas l'âge de 5 ans; ce qui fait une mortalité infantile de 280 à 300 % au moins et où 10 % des mères meurent en couches. 

     Dans 40 pays du monde (sur les 158 qui existent), les moins favorisés par l'économie"Ja nature, la politique, dont 27 sont africains au sud du Sahara, il faut avoir à l'esprit que la «modernité» c'est des soins propres, une épisiotomie, des gants propres, du mercurochrome, une césarienne. 

     Dans ces 40 pays, on dit que, en moyenne, 20 % des populations ont accès à une possibilité de service de santé, de l'infirmier de base qui a 6 mois de formation jusqu'au professeur d'obstétrique à la capitale. Ce qui fait que 80 % des populations n'ont accès à rien et qu'elles gèrent leur vie et leur survie avec des« méthodes traditionnelles» dont je me méfie, car elles engendrent le meilleur et le pire. 

     S'il y a 500 000 femmes qui meurent par an, dans le monde (moi je dis beaucoup plus, un million), cela fait aussi 9 millions de mois de grossesses pour rien, ça fait un million de souffrances pour un accouchement qui n'aboutit à rien pour la mère, le père, la famille et la communauté. 

     Il faut donc agir. 

     Dans ces 40 pays, on sait très bien que le revenu des familles diminue et qu'elles ne peuvent pas se payer la bonne matrone, la bonne sage-femme, le bon médecin, le bon obstétricien et que les ressources de l'Etat diminuent. Ce qui va entraîner qu'il ne pourra pas se payer plus de maternité, plus de qualité de travail, plus de personnel formé, plus de sages-femmes, plus de médecins, et que les capacités d'intervention diminuent. 

     Il faut donc trouver un certain nombre de formules. 

     Je suis tombé sur un article anglais du Lancet. Dans un de ces 40 pays, au Zaïre, dans une mission évangélique américaine, entourée par des médecins, une idée a germé. Les infirmières qui avaient fait leur formation (à l'anglaise) et qui avaient pratiqué leur métier, très concrètement pendant 3 ans, avaient été encouragées à apprendre et à faire des césariennes et des hystérectomies. J'ai cru que ce n'était pas possible. C'est vrai. (Cf. Les Enfants du monde N° 95 UNICEF). Et le résultat est excellent. 

     Il en est de même de la formation des matrones (accoucheuses traditionnelles) dont l'UNICEF soutient la formation à plus d'aseptie et de compétences dans la pratique des accouchements. Ce ne sont pas elles qui vont régler l'accouchement risqué, mais ce sont elles qui pourront supprimer d'éventuels drames. 

     On voulait construire un monde meilleur et on s'aperçoit que ce monde est trop compliqué, que les moyens sont de plus en plus difficiles. 

     Alors, nous en sommes à essayer de régler les problèmes solvables au niveau de la survie pour l'équilibre en santé publique. 

Notre action: - faire savoir; 
- développer, avec les gouvernements, les services qui apportent protection et assistance aux mères depuis le prénatal jusqu'au postnatal, en essayant de faire que les services qui existent ne régressent pas, mais progressent en s'occupant des professionnels classiques et des professionnels empiriques, qui sont souvent d'une très grande qualité. 

     II est quand même étonnant que cette notion de maternité à risque a été mise dans l'ombre jusqu'en 1988. 

     La première des choses est de crier partout que cette situation est intolérable et qu'il faut stimuler les gouvernements, les nations et la communauté internationale pour se dresser contre cette situation. 




07/02/2013
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