158 - programme kangourou de Colombie aux Pays Bas
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De Colombie aux Pays-Bas:
la méthode Kangourou ou peau à peau.
un grand avenir pour le monde moderne
Dr RICHARD DE LEEUW J - pédiatre - Amsterdam - Pays Bas
Placer un bébé dans une pouponnière pour prématurés immédiatement après la naissance à cause de la prématurité ou d'une autre pathologie est un événement de grande responsabilité. pour la mère, cela signifie tout d'abord que l'enfant est éloigné d'elle (et du père). Elle ne peut pas s'en occuper elle-même et, en fait, cela n'est même pas possible. Elle est déçue que sa grossesse se soit terminée ainsi et peut même se sentir coupable. Les parents peuvent aussi être très effrayés que les choses tournent mal pour l'enfant, qu'il risque de mourir ou, dans tous les cas, qu'il ait des séquelles. A cause de la distance physique et de la confusion de tous les sentiments, dans le cas d'une naissance prématurée soudaine, les parents ne s'imaginent pas que le bébé est bien, et la mère n'acquiert pas assez sa confiance personnelle. Alors un développement normal de l'enfant peut être menacé.
Pour l'enfant, cette hospitalisation signifie généralement une période de quelques jours ou de quelques semaines dans un incubateur. Pendant ce temps, il est exposé à de nombreuses situations déplaisantes: exposition continue à la lumière et au bruit du moteur de l'incubateur, examens médicaux de toutes sortes et soins de routine tels que prises de température et prélèvements de sang. Ces procédés et examens viennent toujours de façon impromptue pour le bébé.
Dans l'ensemble, on peut dire que l'enfant reçoit trop de stimuli indésirables. Ces contacts sociaux absents ou défavorables empêchent un enfant dans un incubateur de se développer harmonieusement. Néanmoins, les soins médicaux nécessaires et vitaux ont le grand désavantage psychologique de rendre à risque à la fois le développement de la relation parents/enfant et le développement de la personnalité de l'enfant.
Pendant les dix dernières années, il y a eu changement progressif dans les services de prématurés pour améliorer le contact parents/ enfant et rendre le séjour de l'enfant dans son incubateur plus plaisant. Les parents sont encouragés à établir le contact avec leur enfant en: le touchant, aidant à le soigner, le serrant dans leurs bras, tirer le lait maternel pour que l'allaitement maternel au sein soit possible plus tard. Les bébés en incubateur reçoivent maintenant bien plus d'attentions persohnelles et, en plus du contact médical et des soins nécessaires, le personnel de service a un contact non professionnel avec les enfants.
Les sources psycho-analytiques ont indiqué que l'encouragement au contact cutané entre mère et enfant a une contribution très positive au développement psycho-affectif. L'application de la méthode kangourou pour les bébés en incubateur doit cependant être vue comme un élément dans toutes les mesures de soins qui doivent être prises pour améliorer les conditions psycho-sociales dans les services de prématurés.
En plus de l'avantage psychologique mentionné, un autre argument pour avoir recours à la méthode kangourou, pour les bébés en incubateur (et particulièrement ceux nés prématurément), est le fait que la position verticale sur la poitrine de l'un des parents a un effet très favorable sur le mode de respiration irrégulière du nouveau-né prématuré. A cause du développement incomplet de ces enfants, la régulation de la respiration est encore imparfaite. Des périodes de respiration très rapides alternent avec des périodes de respiration très lentes et même des pauses respiratoires. Cela est appelé la respiration périodique. Les pauses respiratoires se produisent régulièrement chez les bébés prématurés; et lorsqu'elles durent plus que quelques secondes, l'enfant est menacé de manquer d'oxygène. Pour cette raison, de jeunes bébés prématurés sont souvent mis sous enregistrement pour que les pauses respiratoires soient observées immédiatement. De nombreuses mesures sont prises pour prévenir et combattre les pauses respiratoires. La stimulation par de courtes et vives petites tapes est généralement suffisante pour que le prématuré se remette à respirer. Les médicaments qui stimulent le cerveau (tel la caféine) sont aussi efficaces en pratique en réduisant les pauses respiratoires. L'oxygène en apport exogène ou autres formes d'assistance respiratoire sont efficaces aussi, mais ces mesures énergiques ont leurs risques.
Il est très clair que le fait d'être toujours allongé sur le matelas d'un incubateur n'est pas favorable à cela; beaucoup d'autres traitements de stimulation ont été essayés pour combattre les pauses respiratoires en position couchée. Des matelas à eau et matelas de balancement ont prouvé avoir quelques résultats. Les douces et longues caresses de l'enfant par sa mère ont un grand effet aussi. La respiration devient plus tranquille et profonde, et il y a moins de pauses.
La méthode kangourou a un effet similaire, peut-être plus marqué sur la normalisation de la respiration. Lorsque l'enfant est allongé sur la poitrine de sa mère - où il reçoit la stimulation constante des mouvements de la respiration maternelle, son odeur, ses battements cardiaques et ses mouvements ordinaires -, on peut voir très clairement que cela a un effet positif sur sa respiration. Une recherche provisoire, dans laquelle la respiration a été enregistrée par machine pendant le port kangourou, l'a confirmé. Lorsqu'ils sont transportés de cette façon et immédiatement après, on enregistre plus de mouvements respiratoires qu'auparavant chez la plupart des bébés, et le nombre de pauses respiratoires est fortement réduit.
Aux Pays-Bas, tous les enfants admis dans le service néonatal peuvent être traités par la méthode kangourou, qu'ils soient nés prématurément ou non. Les seuls cas où la méthode n'est pas applicable sont quand l'état du bébé est faible ou reste très instable. Cela s'applique en particulier lorsque la respiration doit être intensivement assistée avec un apport extérieur d'oxygène.
Cependant, les enfants ayant un état légèrement plus stable, même s'ils reçoivent encore quelque aide respiratoire, avec un apport d'oxygène et une perfusion, peuvent aussi en général très bien supporter la méthode kangourou. Les enfants peuvent être kangourousés pendant 30 minutes à une heure ou même plus longtemps, deux à trois fois pas jour. Naturellement, cela doit être estimé illdividuellement et dépend aussi des capacités des parents. Le parent qui kangourou se peut s'asseoir, rester debout ou marcher, bien qu'il n'y ait pas souvent de place pour marcher dans un service de prématurés.
Le bébé portant seulement une petite couche est sorti de l'incubateur et posé directement sur le buste nu du père ou de la mère. C'est plus facile si les vêtements propres des parents peuvent s'ouvrir devant; cependant, les bébés dans un état bien stabilisé peuvent être placés dans un tricot (un pull). Un écran est tiré si les parents désirent être en privé. L'enfant est placé dans une position plus ou moins verticale, avec la tête droite, pour éviter les problèmes d'alimentation.
S'il est transporté par la mère, l'enfant peut se tenir entre les seins ou sur un sein, ce qui est plus confortable car il faut une partie charnue. Tout d'abord, une infirmière aidera à mettre le bébé en position kangourou, mais les parents peuvent y parvenir vite d'eux mêmes. La température de l'enfant restera bonne, pourvu qu'elle soit bonne au départ, si le bébé a sur lui une petite couverture et aussi longtemps que la température de la pièce ne sera pas trop basse. Si nécessaire, on peut tenir un masque à oxygène près du visage du bébé et aussi garder les électrodes d'enregistrement; quelques parents préfèrent cela, car c'est plus sécurisant. Pour les infirmières aussi, ces mesures donnent d'autres enregistrements des enfants dont l'état n'est pas encore très stable, et cela les rassure.
Il n'y a eu aucune observation d'infection avec cette méthode. Les parents sont avisés de donner une attention particulière à l'hygiène de leur poitrine. Mais les bactéries de la peau des parents doivent avantageusement combattre les bactéries hospitalières pathogènes. La sonde d'alimentation peut être maintenue pendant le transport «kangourou». D'ailleurs, la possibilité d'allaitement maternel augmente, car la succion forte des mamelons stimule le réflexe de montée laiteuse (la formation de lait commence avec la stimulation émotionnelle). Tirer le lait est aussi un peu plus facile; mais si le bébé est vraiment capable de sucer, il peut le faire tout seul.
Les pères et les mères aiment le transport« kangourou». Cette méthode procure la possibilité d'un vrai ensemble, même si cela doit se passer dans un service hospitalier très occupé. Cela est extrêmement important, particulièrement avec un bébé prématuré qui doit être admis à l'hôpital immédiatement après la naissance et qui est continuellement isolé, reposant dans une couveuse. Le contact direct, physique, de cette méthode soulage la peur souvent ressentie pour un bébé que l'on sent vulnérable; de cette façon, il devient plus familier. Plus tard, les parents disent souvent que les sentiments parentaux viennent seulement lorsqu'ils commencent le transport kangourou. Ils disent aussi qu'ils continuent la méthode kangourou à la maison pour que l'adaptation de l'enfant soit plus facile. Les bébés apprécient très nettement le transport kangourou; ils deviennent plus reposés, relaxés, respirent plus régulièrement et profondément et peuvent communiquer avec leurs parents. Ce transport est une compensation excellente pour contrebalancer les nombreuses et souvent déplaisantes et inattendues activités médicales et de soins subies dans l'incubateur.
Grâce à la méthode kangourou, l'enfant peut parfois sortir plus tôt que prévu de l'hôpital, car les parents sont devenus familiers de leur enfant. Cependant, à la différence du procédé de Bogota, nous n'avons pas pour but de compléter le développement des bébés prématurés entièrement à la maison. Aux Pays-Bas, la méthode kangourou entend combiner les avantages de bonnes facilités hospitalières et la chaleur des liens parentaux.
Une mère, pionnière dans la méthode kangourou, disait cela: « Les mères des bébés prématurés peuvent allonger leurs bébés sur leurs poitrines pour établir le contact mère-enfant aussi naturellement que possible, aussitôt que possible après la naissance. Le bébé n'est plus allongé dans sa boîte de verre en continu. Votre bébé aime sentir votre peau chaude et vos battements cardiaques. Vous essayez de lui parler et de l'apaiser. Vous voyez votre enfant vous regarder et vous pensez même qu'il se moque de. vous. Vous tapotez son petit corps. Voilà comment j'ai expérimenté le transport kangourou avec mon fils Mitchell, qui est né avec 14 semaines de prématurité, et c'est maintenant un bon petit garçon. C'est mieux de trouver un endroit tranquille où on se sent bien pour le transport kangourou. Donnez à votre bébé une couche propre et veillez à avoir un drap en flanelle chaude. Commencez avec la poitrine nue, enlevez aussi votre soutien-gorge. Vous sortez le bébé de l'incubateur et vous le placez entre vos seins, le visage de l'enfant vers votre sein gauche où votre cœur bat. Entourez le drap de flanelle autour de votre bébé, puis mettez votre chemisier, cardigan ou autre vêtement. Allez et asseyez-vous, restez debout ou marchez, parlez, riez et caressez votre bébé. Après 30 minutes ou une heure, vous allez trouver dur de remettre votre bébé dans l'incubateur et vous vous impatienterez déjà jusqu'à la prochaine fois! »
Conclusion
La méthode kangourou semble ainsi être une grande chose dans la surveillance des bébés prématurés. Dans les pays en voie de développement, cela est particulièrement le cas à cause des bons résultats et des faibles moyens que la méthode nécessite. Dans les pays développés, une des raisons est la recommandation des sciences du comportement qui dit que le contact de la peau entre parents et enfants est essentiel, surtout dans le soin technologique donné aux enfants en incubateurs.
Cette méthode simple semble être une technologie appropriée pour les pays développés ou en voie de développement; et il est plutôt remarquable qu'une telle méthode, si peu sophistiquée, nous vient d'un Tiers Monde pauvre, dont la vie est difficile.